Les tête-bêche ont divisé
un certain nombre de collectionneurs de timbres classiques. Ceux qui pensent
qu’ils sont accidentels et ceux qui les croient volontaires. A vous de juger.
Après
la décision de l’Administration de faire imprimer des timbres et la gravure du
poinçon, Anatole Hulot a eu très peu de temps pour tenir ses engagements.
C’est
un chimiste, il connait l’imprimerie mais n’est pas imprimeur, encore moins
typographe. Il a une idée de génie pour multiplier une gravure originale avec
une rigueur mathématique. D’après le poinçon original de Jacques-Jean Barre,
graveur à la Monnaie de Paris, il frappe des flans, ou empreintes, en régule,
alliage de plomb et d’étain, par pression au balancier monétaire à l’intérieur
d’un rectangle aux dimensions exactes du timbre, remplaçant la virole pour les
pièces de monnaie. Les flans sont de dimensions identiques et comportent la
même empreinte. Il aligne parfaitement 150 flans rectangulaires, 10 x 15, et
produit un cliché typographique selon un procédé qu’il maîtrise, la
galvanoplastie.
Pour
le premier galvano, 10 flans sont posés retournés à l’envers, côte à côte, et ainsi
sur 15 rangées, mais Hulot inverse 3 flans, car il ne voit pas le côté de
l’empreinte. On peut très certainement penser que c’est Hulot lui-même qui a
fait l’assemblage pour ne pas divulguer son secret de fabrication. Il est
évident que la mauvaise orientation des flans des 3 tête-bêche est une erreur
et vu l’urgence, il n’était pas question de refaire le premier galvano qui a
servi ainsi seul au début pour l’impression. L’expérience a permis de ne pas
refaire l’erreur pour un second, soit en procédant différemment pour les
aligner ou plus probablement en les marquant à l’arrière pour en reconnaître le
sens.
La
production des timbres s’est faite jour et nuit avec au moins deux équipes, il
était impossible d’attribuer d’éventuelles feuilles mal imprimées à l’une ou
l’autre équipe. Cette expérience a donc servi pour les deux galvanos suivants,
un sans et un avec tête-bêche pour l’impression sur une deuxième presse et
aussi pour la troisième presse nécessaire. Il était alors possible de
reconnaître immédiatement d’un seul coup d’œil la presse utilisée pour
éventuellement corriger les défauts d’impression constatés. Ce n’est pas pour
distinguer le galvano, il avait un numéro frappé sur un bord, ou pour
reconnaître sa mise en train pour un tirage suivant, mais bien pour distinguer
la production de chaque presse.
L’hypothèse
d’une mauvaise orientation à cause d’un défaut de parallélisme des flans est à
écarter, par le nombre restant en trop et en doutant de cette éventualité, le
plomb épousant parfaitement son moule et le défaut d’un plomb mal équarris
aurait entraîné un mauvais alignement des timbres, et ce n’est pas le cas comme
on peut le voir sur les galvanos du Musée Postal, parfaitement alignés.
Il
est à remarquer que le côté tête-bêche semble toujours du côté droit. Les
tirages des autres valeurs semblent avoir été faits sur le même principe de reconnaissance
du côté droit de la feuille. Cela ne laisse pas penser que l’erreur
d’orientation d’un flan puisse se produire fortuitement une fois sur deux. Le
40 c. n’a pas de tête-bêche, cela n’a pas été nécessaire pour le distinguer en
raison de l’erreur initiale de l’utilisation des deux flans du 20 c. corrigés
en 40 c.
De
plus, les tête-bêche pour les dernières valeurs à en avoir, sont sur le bord du
galvano, position 90, 131 ou 150, ce qui tendrait à penser que l’inversion a
été faite volontairement au dernier moment avant la mise au bain, alors que
tous les flans étaient bien orientés, et l’inversion deux fois en position 131
n’est pas due au hasard. La position en milieu de galvano n’a pas d’explication
logique, mais rien n’empêche de penser à une inversion volontaire. Pour le 10
c. Présidence, le tête-bêche en position 81, n’aura pas besoin de servir,
puisque seuls deux galvanos seront utilisés sur les trois. La position du
tête-bêche en x1 ou x0 pourrait s’expliquer en fonction des ouvriers qui
alignaient les flans, en commençant soit du côté gauche soit du côté droit de
l’ensemble et retournaient après coup un flan sur le côté opposé à l’appui
latéral.
Pour
ceux qui pensent au retournement accidentel d’une empreinte, comme certains
experts philatéliques qui ont décrété une fois pour toute que les tête-bêche
étaient des erreurs, je ne crois pas qu’ils puissent penser que les ouvriers de
l’époque étaient des incapables et qu’ils aient pu persévérer dans la première erreur,
une fois sur deux, même si les timbres tête-bêche étaient considérés sans
importance et tolérés par l’Administration. Si c’est accidentel ou par hasard,
pourquoi l’erreur ne s’est-elle pas reproduite après pour tous les timbres,
jusqu’aux derniers timbres en typographie des « Marianne » de Béquet.
Continuer
à penser à des inversions involontaires, c’est penser que les ouvriers de cette
époque n’avaient pas de chance au point d’aligner 149 flans dans le bon sens et
un seul à la fin, en position 150 à l’envers, ou qu’ils aient attendu autant d’années
(jusqu’au 4 c. lauré) pour trouver une solution pour les mettre tous dans le
même sens sans se tromper, du fait qu’ils ne pouvaient pas voir une inversion
avant d’avoir fini.
En
1848, ce n’est que le début d’une production qui deviendra très importante mais
ce procédé pour l’identification des feuilles imprimées n’est pas une bonne
idée. Il sera abandonné et remplacé par d’autres plus tard, comme l’impression
de la date, du numéro de machine, de la lettre d’identification du conducteur
de la presse, de l’impression du millésime, des coups de pointeau sur les
parallélogrammes des quatre galvanos en typographie rotative, des traits pour
chacune des trois feuilles au tour sur les rotatives taille-douce, le
remplacement de l’indicatif des feuilles sur ces mêmes presses taille-douce en
1964, et jusqu’à l’impression du code barre.
Bonjour,
RépondreSupprimerExposition d'une théorie qui a le mérite de faire bouger les lignes immobiles qui arrangent beaucoup de monde...
Cette théorie n'est pas plus idiote et irréaliste que celle pronant l'erreur humaine!!
Olivier